- EAN13
- 9782753559325
- Éditeur
- Presses universitaires de Rennes
- Date de publication
- 12/02/2019
- Collection
- Histoire
- Langue
- français
- Fiches UNIMARC
- S'identifier
Clameur publique et émotions judiciaires
De l’Antiquité à nos jours
Presses universitaires de Rennes
Histoire
Autre version disponible
Quel sens accorder aux manifestations sonores et publiques qui émaillent
l'histoire de la justice ? Oubliés aujourd'hui, des cris judicaires
parfaitement licites avaient pu investir des collectivités humaines entières
d'un statut complet d'auxiliaire de la justice et de protection des
vulnérables. Le « Haro ! » normand, sans doute le plus connu de ces cris,
mobilisait tout un voisinage contre une offense. Mais il n'est pas le seul :
bien des procédures justifiaient qu'une « clameur publique » saisisse le
prétoire, autorise une poursuite à « cor et cris », étreigne un suspect, avant
d'exiger du juge un prompt jugement. L'origine et l'ampleur de ces
manifestations collectives bruyantes méritent de nouvelles approches inspirées
par la recherche en histoire sonore du fait politique. De l'Antiquité à nos
jours, si l'on connaît quelques formes de ces appels au secours judiciaire qui
fondaient une plainte reçue par une procédure, la justice qui se construisait
– ou se déconstruisait – autour de ces bruits reste à explorer, ou doit être
relue par la focale de cet objet sous-estimé qu'est la clameur publique. Elle
se lie et se délie sans cesse autour de l'histoire de l'oralité, des
flagrances et de la dénonciation. Jetées à la face des juges, les expressions
de la mobilisation collective engageaient également les identités
communautaires et patriotes : appel au pouvoir souverain, elles renvoyaient ce
dernier à son rôle fondamental de débiteur de justice. Escortant de près ces
interactions intenses entre le pouvoir judiciaire et la foule, la clameur
publique évoque aussi la vindicte et le lynchage. Est-ce cela qui fit qu'elle
fut nettement infléchie aux Temps modernes ? Doit-on y lire une dérégulation
des mouvements collectifs au bénéfice de la police et de la justice ? Les
communautés, lentement dépossédées de leurs cris judiciaires par l'État
justicier, n'ont pourtant pas si facilement abandonné le monopole de la
violence licite face à la flagrance des offenses. Les réactions collectives
dressent et redressent continuellement les scènes du théâtre de nos agitations
publiques. De la clameur publique, aux émotions judiciaires, il est donc un
chemin historique que cet ouvrage arpente pour faire la démonstration suivante
: ces interactions frénétiques unissant les foules à leurs justices, nouées
autour de la clameur publique, hantent encore nos procédures.
l'histoire de la justice ? Oubliés aujourd'hui, des cris judicaires
parfaitement licites avaient pu investir des collectivités humaines entières
d'un statut complet d'auxiliaire de la justice et de protection des
vulnérables. Le « Haro ! » normand, sans doute le plus connu de ces cris,
mobilisait tout un voisinage contre une offense. Mais il n'est pas le seul :
bien des procédures justifiaient qu'une « clameur publique » saisisse le
prétoire, autorise une poursuite à « cor et cris », étreigne un suspect, avant
d'exiger du juge un prompt jugement. L'origine et l'ampleur de ces
manifestations collectives bruyantes méritent de nouvelles approches inspirées
par la recherche en histoire sonore du fait politique. De l'Antiquité à nos
jours, si l'on connaît quelques formes de ces appels au secours judiciaire qui
fondaient une plainte reçue par une procédure, la justice qui se construisait
– ou se déconstruisait – autour de ces bruits reste à explorer, ou doit être
relue par la focale de cet objet sous-estimé qu'est la clameur publique. Elle
se lie et se délie sans cesse autour de l'histoire de l'oralité, des
flagrances et de la dénonciation. Jetées à la face des juges, les expressions
de la mobilisation collective engageaient également les identités
communautaires et patriotes : appel au pouvoir souverain, elles renvoyaient ce
dernier à son rôle fondamental de débiteur de justice. Escortant de près ces
interactions intenses entre le pouvoir judiciaire et la foule, la clameur
publique évoque aussi la vindicte et le lynchage. Est-ce cela qui fit qu'elle
fut nettement infléchie aux Temps modernes ? Doit-on y lire une dérégulation
des mouvements collectifs au bénéfice de la police et de la justice ? Les
communautés, lentement dépossédées de leurs cris judiciaires par l'État
justicier, n'ont pourtant pas si facilement abandonné le monopole de la
violence licite face à la flagrance des offenses. Les réactions collectives
dressent et redressent continuellement les scènes du théâtre de nos agitations
publiques. De la clameur publique, aux émotions judiciaires, il est donc un
chemin historique que cet ouvrage arpente pour faire la démonstration suivante
: ces interactions frénétiques unissant les foules à leurs justices, nouées
autour de la clameur publique, hantent encore nos procédures.
S'identifier pour envoyer des commentaires.